Depuis toujours, Solano Càrdenas a la tête levée vers le ciel, au point que, nous autres bipèdes terrestres, nous ne sommes pas très sûrs de retenir son attention. Fort heureusement pour nous, cet amour invétéré de l’enfant Solano pour les choses volantes, il s’est trouvé que la présence d’un sculpteur remarquable, son propre père, celle aussi de quelques peintres amis, l’ont de bonne heure orienté dans la voie de l’expression artistique. Tout naturellement, il s’est retrouvé sculpteur et peintre d’objets volants non identifiés avant lui, les espaces célestes se confondant désormais à ses yeux avec l’espace de la création esthétique.

On se tromperait fort cependant en s’imaginant que c’est une convergence simpliste et en quelque sorte mécanique qui gouverne la relation entre les formes inspirées par l’appel des espaces aériens et celles qui dépendent d’exigences esthétiques. Même lorsqu’elles tendent à se confondre, elles n’en demeurent pas moins distinctes, ce dont personne n’est plus conscient que Solano Càrdenas !

Aussi son oeuvre se développe-t-elle de façon pleinement autonome, que ce soit dans les deux ou dans les trois dimensions. La sculpture, chez lui, est à l’origine de figures d’une rare pureté et d’une extrême élégance, où, pour ma part je serais tenté de reconnaître les principales divinités d’un Olympe complètement étranger aux vicissitudes humaines. Les dessins et les peintures, par contre, nous entretiennent, me semble-t-il, d’une faune plus familière, même si elle n’est pas dépourvue elle non plus d’une fascinante étrangeté. Mais au lieu de se découper idéalement, comme le font les sculptures dans un espace pur, et par les miasmes de notre humanité, les dessins et les peintures participent à ce perpétuel combat de la lumière et des ténèbres dont est faite, irrémédiablement, notre humaine condition. Ce qui la rend à la fois si éprouvante et si attachante.

De telle sorte que, née de l’impérieuse et durable pression des rêves de l’enfance, l’oeuvre de Solano Càrdenas nous propose simultanément les fulgurantes visions de l’espace sublimé et les troublants autant que séduisants tâtonnements de la création artistique.

Jose Pierre